samedi 24 novembre 2012

A LA SAINTE-CATHERINE...



Albert Lynch
"Jeune Beauté au Chapeau Vert"
Réalisme
Via
25 novembre : Sainte Catherine
 
Dicton du Jour : "A la Sainte Catherine, tout bois prend racine"... mais pas seulement :
Dans le monde de la Mode, La Fête des "Catherinettes" rend hommage aux créateurs de chapeaux, aux modistes et surtout à Sainte Catherine d'Alexandrie, protectrice des jeunes femmes célibataires, car elle refusa les liens sacrés du mariage. A la fois vierge, martyre et docteur de l'Église, Sainte Catherine est représentée avec 3 auréoles, la blanche des vierges, la rouge des Martyres et la verte des Docteurs de l'Eglise.



Sainte Catherine d'Alexandrie
via
Un peu d'Histoire : 

Dans l'Egypte du IVe siècle, à Alexandrie, (alors sous domination romaine), la jeune et noble Catherine, orpheline de père, se passionnait pour l'étude des sciences, des Arts, de la philosophie et fréquentait poètes et penseurs. Illuminée par sa Foi, elle se sentait "mariée" à Jésus. Mais l'empereur Maxence exigea des Alexandrins un hommage aux idoles. Catherine souhaita rencontrer l'empereur pour une discussion afin de le convaincre de retirer son exigence. Maxence, prévenu de l'intelligence et de la force du verbe de Catherine, refusa la joute oratoire et lui imposa un débat face à 50 philosophes convoqués pour la contrer. La jeune femme se montra si convaincante que certains penseurs se rallierent à son propos. Maxence tomba sous son charme et lui proposa de l'épouser. Catherine refusa. Après un supplice où la roue se brisa miraculeusement, elle fut décapitée le 25 Novembre de l'An 310... Elle avait 18 ans.
D'où le symbole du Chapeau aujourd'hui.


Anonyme "Danse des Catherinettes"
Anciennement attribué à Brughel l'Ancien
IIe moitié du XVIe siècle
Musée de l'Hôtel Sandelin - St-Omer

L'expression "coiffer Sainte Catherine" signifiait ne pas être mariée l'année de ses 25 ans. La tradition remonte au XVIème siècle. A cette époque et jusqu'au XIXe siècle, le 25 novembre était l'occasion de renouveler la coiffure de la statue de la sainte dans les églises, les femmes célibataires entre 25 et 35 ans se chargeaient de cette tâche. On les nommait "les Catherinettes". (Les hommes célibataires ont eux aussi leur Saint Patron en la personne de Saint Nicolas - "Coiffer Sainte Catherine" pour les filles, se dit "Porter la Crosse de Saint Nicolas" pour les garçons)...

Louis Marie Lante (dessinateur)
George Jacques Gatine (graveur)
"La Modiste"
Vers 1824
Gravure Taille-Douce
 Musée des Civilisations de l'Europe et de la Méditerranée - Paris
 
Sainte Catherine devint au XIXe siècle la protectrice des modistes, car nombre de jeunes femmes avaient pour profession de confectionner des chapeaux. Le 25 novembre, jour de la Sainte-Catherine, les maisons de couture parisiennes organisaient (et organisent toujours) une fête ou un défilé lors desquels les "Catherinettes" (jeunes femmes célibataires agées de 25 ans) portaient des chapeaux sophistiqués et extravagants, fruits de leur création. Leurs couleurs, le jaune et le vert symbolisant, à la base, Foi et Connaissance, étaient devenues par déformation populaire, la couleur blanche jaunie de la robe de mariée, et le vert de l'espoir (ben vi, rien n'est perdu à 25 ans ! lol).
 
C'est l'occasion ou jamais d'admirer quelques chapeaux :


Edgar Degas
"Chez la Modiste" 1898
Pastel
Impressionnisme
Edgar Degas
"Chez la Modiste"
1880
Pastel
Impressionnisme
Edgar Degas
"Chez la Modiste"
Pastel
entre 1879 et 1886
Art Institute Chicago
Impressionnisme
Henry Tonks
"Chez la Modiste"
1892
Impressionnisme
via
August Macke
"Femme à l'Ombrelle devant un Magasin de Chapeaux"
Expressionnisme

Pierre-Paul Rubens
"Le Chapeau de Paille" ou" Suzanne Fourment"
1625
Baroque Flamand
National Gallery
 
JohannèsVermeer
"La Dame au Chapeau Rouge"
1665
Baroque Flamand
Washington, National Gallery of Art
Jean-Baptiste Greuze
"Le Chapeau Blanc"
Vers 1780
Classicisme
Museum of Fines Arts -  Boston

Friedrich von Amerling
"Jeune Fille au Chapeau"
1834
Hermann Fenner-Behmer
"De quoi écrire"
1890
William Mac Gregor Paxton
"Cherry" (ou "The Gay Nineties")
1906
Impressionnisme
Collection Privée
doc : Art Renewal Center
Léo Fontan
"Jeune Femme au Chapeau"
Vers 1920
Document Arcadia
Jean-Gabriel Domergues
"Femme en noir à Venise"
1919
Impressionnisme
Via
William Mac Grégor Paxton
"La Russe"
1913
Impressionnisme
Via

lundi 19 novembre 2012

LES FOLLES ANNEES DE GEORGE BARBIER

George Barbier "La Vénitienne"
"L'Illustration" Numéro de Noël 1921
Avec Erté  (clic), avec qui il collabora pour des costumes et décors aux Folies-Bergères, Georges Barbier reste l'illustrateur emblematique de l'Art Déco et des Années Folles (1919-1929). Le style de l'artiste est raffiné, riche, créatif, enjoué, chic et merveilleusement sophistiqué. Son trait n'a pas pris une ride ! Je ne sais pas si vous êtes de mon avis, mais j'adore cette classe et ce panache !
 
George Barbier
L'Oiseau Volage
1914
Exquises aquarelles de soirées mondaines dans de luxueux intérieurs Art Déco, gravures de scènes galantes ou rêveries dans des parcs luxuriants, apartés dans des jardins d'Hiver japonisants, longues silhouettes féminines vêtues d'atours aux étoffes précieuses, modèles des couturiers en vogue, Paul Poiret, Frederick Worth, Jeanne Paquin, Madeleine Vionnet,  ces illustrations séduisent toujours et encore le spectateur... C'etait là le secret de George Barbier...  

George Barbier
Paul Poiret Modèle Haute-Couture
1912
Le trait simple et efficace,  presque naïf en apparence, était en réalité un travail considérable d'épuration, de stylisme, on peut parler de fausse simplicité mais de réelle beauté et d'esthétisme touchant. Ce passé-là reste très moderne, à la fois sophistiqué et fascinant. Un soupçon d'érostisme et de fantaisie, de l'élégance et une créativité hors pair, Barbier lança l'Art Déco.



George Barbier
Modèle Haute-Couture Worth
Manteau du Soir
1924

Le 16 Octobre 1882, la bonne ville de Nantes vit naître George Barbier, sous le signe de la Balance, nul ne pouvait déjà prédire le talent et la renommée dont le nouveau-né jouirait dans sa vie, car les fées s'étaient penchées sur son berceau... De son enfance passée rue de la Contrescarpe, l'histoire n'en retient pas grand chose, sinon qu'il passait son temps à reproduire les tableaux de Watteau et d'Ingres. C'est à partir de son arrivée à Paris que commença la légende....
 
George Barbier
La Belle Hélène
1922
 
George Barbier étudia à l'Ecole des Beaux-Arts sous la houlette du peintre Académiste Jean-Paul Laurens, de 1908 à 1910. Il commença à exposer lors du Salon des Humoristes de 1910, sous le pseudonyme d'Edouard William, puis à la Galerie Boutet de Montvel, chez son cousin. A partir de 1912, tout s'enchaina... Ce fut au Salon des Artistes Décorateurs que ses gouaches, aquarelles, et projets de décoration et de textiles au style déjà affirmé plurent au public. Barbier avait 29 ans...
 
 
George Barbier
"Mère Nature"
 
La même année, l'artiste présenta des oeuvres déclinées sur le thème de La Comédie Humaine à La Galerie Georges Petit, rival du célèbre Durand-Ruel. La finesse de son trait et sa maitrise séduisirent les éditeurs d'ouvrages de luxe : en 1913, Barbier devint célèbre grâce à l'illustration des volumes des "Danses de Nijinski". Les sauts, pirouettes et arabesques du danseur étaient mis en page avec une admirable virtuosité.

George Barbier
Vaslav Nijinsky et Ida Rubinstein
Ballet "Shéhérazade"
1913

Il récidiva avec "Anteros", puis avec tout autant de panache pour un livre consacré à la danseuse Tamara Karsavina, puis la danseuse Ida Rubinstein, ce qui entraina l'édition de nouveaux ouvrages luxueux.

George Barbier
Illustration pour  "Les Fêtes Galantes"
de Paul Verlaine
1921
 
 
Mais l'artiste avait l'âme facétieuse, et illustrait régulièrement des journeaux satiriques tels que "La Baïonnette" et "Le Rire". Il retrouvait son sérieux pour la revue de mode "Gazette du Bon Ton", créee en 1912, pour laquelle son talent d'écrivain était aussi pertinent que son talent de dessinateur. Il reproduisait les robes des grands couturiers, en particulier de Worth, où l'on retrouvait le charme des laques d'Extrême-Orient. (On peut voir ces gravures aujourd'hui au Victoria and Albert Muséum.)...
 

George Barbier
Fantaisie d'Automne
Femmes Champignons
La Vie Parisienne
1916
via
 

Dès sa première parution française en 1920, "Vogue" se para des couvertures de Barbier. Mais Vogue ne fut pas le seul magazine à solliciter Barbier, l'artiste collabora également à "Modes et Manières d'Aujourd'hui", à "Harper's Bazaar" dès 1916, puis "Comoedia Illustré", "Fémina", "l'Illustration" et "Les Feuillets d'Art". Barbier dessinait aussi des bijoux pour Cartier, créait verrerie, tissus et papiers peints...



George Barbier 1924
Dans les années 20, Music-Hall, Ballet, théatre et cinéma firent appel au merveilleux univers créatif de Barbier, inexorablement somptueux et extravagant. L'intégralité de la garde robe du film "Monsieur Beaucaire" avec le célèbre acteur Rudolph Valentino, fut créee par Barbier. Entre autres films, car l'artiste travailla pour le cinéma jusqu'en 1930.  
 
Affiche du Film "Monsieur Beaucaire"
Costumes de George Barbier
 
George Barbier
Maquette Costume Jeanne Rose
1922

 
George Barbier signa également des décors pour les Folies-Bergères. C'est en compagnie d'Erté qu'il atteint une popularité grandissante auprès du public. Barbier écrivit même le discours de l'expostion d'Erté en 1929. Le dernier spectacle sur lequel travailla Barbier fut "Paris Shakes" avec Joséphine Baker au Casino de Paris.


Cécile Sorel au Bal du Grand Prix
1923
"L'ai-je bien descendu ?"
 
 George Barbier illustra de manière résolument originale et moderne des oeuvres de Baudelaire, de Théophile Gautier, de Pierre Louÿs, d'Alfred de Musset, "Les Fêtes Galantes" de Verlaine, d'Henri de Regnier, "Casanova" de Maurice Rostand, ou "Les Liaisons Dangereuses" de Choderlos de Laclos...
 
 
George Barbier
Falbalas et Fanfreluches
1923
Cliquer sur l'image pour agrandir

"Falbalas et Fanfreluches", almanach de modes illustré au pochoir, fut en quelque sorte son chef-d'oeuvre. Cet ouvrage parut de 1922 à 1926, édité chez Meynial.
Barbier dirigea un groupe aux Beaux-Arts de Paris, "Les Chevaliers du Bracelet" composé de plusieurs amis et illustrateurs dont son cousin Bernard Boutet de Montvel.


George Barbier
"Maudit Vent"
Manteau du Matin de Cheruit
"La Gazette du Bon Ton"
 
Barbier puisait son inspiration dans l'Antiquité, l'Art Japonais, les miniatures Hindoues et le XVIIIe siècle et la Comedia dell Arte car Barbier aimait Venise, mais l'influence de Léon Baskt, pour les couleurs, de William Morris pour le stylisme et celle d'Aubrey Beardsley, (clic) pour le trait, furent prépondérantes dans son oeuvre.
A l'apogée de son succès, l'artiste s'éteignit à l'âge de 50 ans, en 1932. Son oeuvre reste flamboyante. Aujourd'hui, nombre de créateurs de costumes s'inpirent de l'Art de George Barbier.
 
 
George Barbier
"Les Fêtes Galantes"
Feu d'Artifice à Venise
1921

George Barbier
Costume pour "Saisons Russes" de Sergei Diaghilev


Quelques vidéos, pour le plaisir...
 

jeudi 15 novembre 2012

JAUNE CITRON

Giovanna Garzoni
"Trois Citrons et une Abeille"
XVIIe siècle
Baroque Italien
Jaune Citron...
Sa couleur or et sa pulpe délicate protégée par une écorce grenue font du citron le fruit de la perfection décrit dans la Bible, l'autre "Pomme d'Or", parfois confondu avec le fruit de la Tentation. Or, le citron a de sérieux atouts pour symboliser à lui seul l'immortalité. Il fleurit et fructifie en toute saison, Hiver inclus. Ses vertus médicinales en ont fait le guérisseur de bien des maux.
 
 
Giovanna Garzoni
"Nature Morte au Plat de Citrons"
Vers 1640
Baroque Italien
Cher Citron... 
En Peinture, le citron apparut à la Renaissance, mais seulement en qualité d'ornement précieux,  car il était si rare que son prix était quasiment prohibitif. Déjà, l'empereur Romain Doclétien avait fixé son prix à douze fois celui d'un melon ! Indispensable au rituel Juif, après l'exode de Babylone, les Hébreux l'adaptèrent à nos climats et difusèrent sa culture en Europe.
 
Jacob van Hulsdonck
"Nature morte avec Citrons, Oranges et Grenades"
1640
Doc : Getty Center - Los Angeles
Baroque Flamand
Prodigieux Citron...
Dans la Peinture Flamande, puis Hollandaise du XVIIe siècle, le citron fut l'ornement des fastueuses tablées des mises en scènes de Natures Mortes, entier ou délicatement pelé.
Plus que symbole de l'immortalité, il devint celui du temps qui passe et de la vanité des biens terrestres. Au XIXe siècle, sa culture s'intensifia et sa consomation devint courante. Manet et les Impressionnistes négligèrent toute signification religieuse au citron et firent oublier peu à peu celle-ci.
 

Edouard Manet
"Citron" 1880
Impressionnisme
Musée d'Orsay - Paris

Couleur Citron...
La couleur du citron a valu bien des déboires aux artistes. Fabriqué à partir de l'orpiment, (pigment naturel dérivé de l'arsenic), ou à partir d'urine et de bouse de vache pour le Jaune Indien, ou par un mélange de plomb et d'oxyde d'antimoine pour le Jaune de Naples, les recettes chimiques de fabrication du jaune restent très toxiques sans pour autant parvenir à rivaliser avec l'Or pur. En peinture, le jaune a fini par devenir la représentation des exclus, des traitres et des menteurs...  Une couleur péjorative aux antipodes de ses vertus symboliques.
 
Pieter Claesz
Nature Morte aux deux Citrons
un Façon de Venise en verre, Roemer,
Couteau et Olives sur une Table
1629
Metropolitan Muséum of Art - New-York
 
Pieter Claez
"Nature Morte au Crabe" XVIIe siècle
Baroque Hollandais
Musée des Beaux-Arts - Strasbourg
 
Francisco de Zurbaran
"Nature Morte aux Citrons, Oranges et Rose"
vers 1633
Baroque Espagnol
Norton Simon Fondation - Los Angeles
Fabuleux Citron... 
En Espagne dès 1633, en plein Siècle d'Or et sous le règne de Philippe IV, le précieux citron fit son entrée dans les cuisines européennes. Ce tableau de Francisco de Zurbaran est une "Vanité" sans crâne, la mise en scène rigide et théatrale rappelle sciemment les symboles des sujets représentés : l'Orange comme le Citron figurent l'immortalité et la Rose coupée rappelle la brièveté de la vie. Par cette oeuvre, l'artiste invite à se méfier des tentations matérielles  de ce monde et à méditer sur notre condition mortelle.


Henri-Achille Zo
"Aguadora"
Vers 1900
Musée d'Orsay
Document : Base Joconde
 
Claude Monet
 "Citrons sur Branche" 1884
Impressionnisme
Guiseppe Arcimboldo
"L'Hiver"  - 1573
Maniérisme
 Kunthistorisches Museum - Vienne
Regardons de plus près ce buste de vieillard de profil sur fond noir. Il fait partie de la série des Quatre Saisons peintes par Guiseppe Arcimboldo. Le surprenant puzzle est composé d'une souche à l'écorce crevassée, de racines, de champignons, de lierre, d'une natte d'osier et de deux fruits. Arcimboldo brouille les pistes (mais l'on connait son sens de l'humour ! ) avec ces motifs sensés évoquer la vieillesse, la laideur et la mort. Car un détail détonne : le citron rutilant accroché au cou du personnage. Le symbole de l'immortalité et de la fertilité au coeur de l'Hiver ensoleille le tableau. A travers cette image codée, l'artiste n'oublie pas de flatter la longévité des Habsbourg, ses mécenes (Arcimboldo était le protégé des empereurs Maximilien II et Rodolphe II). Habile message politique en temps de guerre, l'oeuvre a été construite comme une énigme à plusieurs sens, mais le XVIe siècle était résolument Manieriste !

Guillaume Van Deynum
"Nature Morte aux Fruits" XVIIe
Musée de Picardie - Amiens

Jacob Foppens Van Es
"Nature Morte au Pichet" XVIIe siècle
Valenciennes - Musée des Beaux-Arts

Andrée Karpelès
"Nature Morte au Citron"
Musée des Beaux-Arts - Limoges
Doc : Peintures et Musées de France
Source documentation : d'après Hélène Mugnier - Ed Plume de Carotte.

lundi 12 novembre 2012

L'UNIVERS CONTROVERSE D'AUBREY BEARDSLEY

Isolde 1895


On dit qu'Aubrey Beardsley lança le style des vignettes Art Nouveau, ce genre d'ex-libris en noir et blanc tout à fait caractéristique de cette période. L'oeuvre de Beardsley est pour la plus grande partie en noir et blanc, encrée, gravée et lithographiée.


Ex-Libris
Poète, auteur, romancier, illustrateur, musicien et personnage à l'esprit vif, l'artiste eut une vie peu ordinaire, peut-être à l'image de son originalité, mais elle fut brève et sa création picturale s'étend sur seulement 6 ans.
 

Illustration pour "Mademoiselle de Maupin"
de Théophile Gautier
 
Cadet de sa soeur Mabel, Aubrey Vincent Beardsley naquit le 21 août 1872 dans l'élégante ville anglaise de Brighton. Pour la bonne société, sa mère, Ellen Agnus Pitt, fille du chirurgien-major de l'armée des Indes William Pitt, avait commis une mésalliance en épousant Vincent Paul Beardley, mari peu sérieux, qui plus tard avait dû vendre une partie de sa propriété pour réparer une promesse de mariage faite à une autre femme. Depuis cette fâcheuse histoire, Aubrey Beardsley, sa soeur et ses parents vivaient au 12 Buckingham Road, dans une maison de la famille Pitt, jusqu'en 1883, année où la famille Beardsley s'installa à Londres.
 
La Dame aux Camélias

Dès 1884, à l'âge de 12 ans, Aubrey et sa soeur Mabel donnaient des récitals de piano au Pavillon Royal de Brighton, ils furent qualifiés par le public de "phénomènes musicaux". La mère de Beardsley contracta la tuberculose et les enfants furent contraints de vivre chez une tante qui envoya Aubrey en pension... En 1885, élève de la Grammar Schoool Hove and Sussex de Bristol, il écrivit une pièce qu'il joua avec d'autres étudiants. Au même moment, ses premiers dessins et illustrations furent publiés dans le journal de l'Ecole. A 15 ans, Beardsley avait illustré ses livres favoris, comme Madame Bovary ou Manon Lescaut.

Pierrot 1896
 
Employé dans un bureau d'architecte à partir de 1888, puis dans la Compagnie d'Assurances Guardian Life and Fire, Breardsley souhaita rencontrer le préraphaélite Edward Burnes-Jones en 1891, puis ce fut le tour de Pierre Puvis de Chavannes... Les deux artistes, impressionnés par le contenu du carton à dessin de Beardsley furent unanimes : celui-ci devait perséverer, il était artiste, et devait vivre de son talent. En 1892, il entra à la Westminster School of Art sous la férule professorale de l'artiste Frederick Brown (1851-1941), dont l'oeuvre et le style étaient largement influencés par Bastien-Lepage.



"Les chaussures de Cendrillon" 1894
Illustrateur et graveur, artiste de l'Art Nouveau et de l'Esthétisme anglais, Beardsley  influença le Symbolisme français, il ne tenait pourtant compte ni de la perpective, ni des conventions de proportions. Beardley utilisait les aplats de couleurs entre le blanc de réserve et le noir, ce qui créa une petite révolution dans l'Art.


Illustration pour "Le Morte Darthur"
La Dame du Lac
Beardsley avait 20 ans lorsqu'il reçut sa première commande : il réalisa les 500 vignettes et illustrations pour "Le Morte Darthur" - la Mort d'Arthur titre orthographié ainsi dans sa première édition - il travailla en parallèle pour le recueil "Les Bons Mots". "Le Morte Darthur" valut à Beardley l'admiration de Kandinsky, père de l'Abstrait, et de Picasso, père du Cubisme.


"Le Morte Darthur"
Excalibur
La carrière de Beardsley s'étend sur six ans de production créative majeure que nous pouvons découper en trois périodes.
Tout d'abord, de 1891 à 1892, époque pendant laquelle l'artiste ne signait pas ses oeuvres, puis celle où il progressa et signait AVB, puis AB au moment où, fortement inspiré par l'Art Japonais, son trait devint gracieux.  Tout d'abord tenté par les vases de l'Antiquité grecque, ce fut l'influence du Shunga, Art érotique japonais, qui lui attira nombre de détracteurs, autant que d'amateurs...


"Le piège des vendanges" 1894
 
La plupart des oeuvres de l'artiste sont exécutées à l'encre de Chine, et presque toutes qualifiées de décadentes, car réellement obcènes, mais Beardsley se complaisait dans le grostesque.


Salomé "La Robe-Paon" 1896

Beardsley  illustra la première édition en français de la célèbre pièce "Salomé" d'Oscar Wilde, où loin des sources bibliques, l'héroïne était une femme fatale de la fin du XIXe. Beardley refletait parfaitement l'esprit de Wilde. Puis l'artiste commis d'autres oeuvres, car caricaturiste de talent, il ne manquait pas de croquer les hommes politiques de son époque. Mais il revint à sa noirceur pour "Lysistrata" d'Aristophane.

"John et Salomé" 1896

Célèbre pour avoir créé l'inovant "Yellow Book", magazine où il était directeur artistique, Beardsley en fut renvoyé lors du scandale du procès d'Oscar Wilde dont il était proche. Cependant les illustrations de "Salomé" éxposées à Paris furent un immense succès. Puis l'artiste travailla pour les magazines "The Savoy" et "Studio", concurents du "Yellow Book".

Illustration pour "The Savoy" 1896
 
 Venu sur la Côte d'Azur pour se soigner, Beardsley était atteint de tuberculose depuis plusieurs années, il mourut dans une chambre de l'Hôtel Cosmopolitan à Menton, le 15 mars 1898. L'artiste avait 25 ans. Anglican converti au Catholicisme, Beardsley demanda sur son lit de mort que ses illustrations érotiques soient détruites, mais son éditeur refusa. Son oeuvre eut un impact tel que même Walter Crane et William Morris en furent influencés.
 
 

La Cape Noire 1897
Portrait de l'Actrice Rejane
1898

Signature d'Aubrey Beardley